Quelimane-Inhambane : De la guerre civile aux récifs coraliens



Nous voila donc coulant des jours heureux dans la ville de Quelimane. La ville nous plait d’entrée, suffisamment grande pour avoir tout ce que nous aimons et assez petite pour que nous puissions connaitre ses rues comme notre poche rapidement. Autre avantage non négligeable de Quelimane selon notre guide : sa gastronomie qu’il place en number one du mozambique. Autant dire que c’est les crocs acérés que nous nous mettons en branle pour trouver un petit restau à la cuisine typiquement zambézienne. Après pas mal de recherche c’est un choux  blanc, la seule spécialité que l’on nous propose c’est du riz-poulet. Pas dingue ça. Par contre nous découvrons une version mozambicaine du fastfood proposant glace à l’italienne, gâteau au chocolat et brochette au barbecue. Ô ciel !Ce gâteau au chocolat, rien que d’en parler j’en ai les larmes aux yeux. Bref vous vous dites, pourquoi il nous raconte ça celui-là, on s’en cogne de son gâteau au chocolat. Mais tout ça pour vous dire que nous y établissons notre QG pendant 3 jours et que nous sommes heureux et ça c’est important. A Quelimane nous découvrons la plage de Zalala située à quelques bornes du centre. Une étendue de sable bordée d’une grande forêt sauvage dont Alex grand nostalgique qu’il est nous dira « Ouais bah on dirait les Landes quoi ». Une vraie plage sauvage où l’activité frénétique des pêcheurs nous rappelle que la mer ça ne sert pas qu’au tourisme. Nous y découvrons d’ailleurs qu’à Zalalaon pêche le requin-marteau dont la tête ressemble effectivement à un marteau contrairement au poisson-chat qui ne ressemble pas un chat.

Ironie du sort, un pêcheur dans ses filets..


A tout moment ici tu peux te retrouver assis sur un requin marteau! 

Le seul point noir de notre passage à Quelimaneest cette scène où, attablésà notre fastfood préféré, nous voyons une jeune femme voler quelques brochettes avant de se faire rouer de coups par le serveur et l’agent de sécurité du coin sous l’œil goguenards des passants. En Tanzanie et au Mozambique nous avions déjà pu constater que le vol est extrêmement mal considéré. Mais la violence des coups portés et le décalage entre le « crime » et la peine choque nos esprits occidentaux. Un vrai sentiment de malaise nous saisit pour la première fois ici. Nous ne savons pas trop quoi penser de la scène, oscillant entre volonté de ne pas porter de jugement et malaise provoqué par l’événement.

Champion! 

Nous passons donc un jour puis deux puis trois à Quelimane, mais contrairement à ce que vous pouvez croire ce n’est pas que le gâteau au chocolat qui nous retient. En effet c’est à Quelimane que l’actualité brûlante du Mozambique vient rattraper et perturber notre voyage. Pour mieux comprendre les péripéties qui vont suivre remontons un peu dans le passé pour un cours express sur l’histoire du Mozambique. Super ! En 1975, le peuple mozambicain (ou mozambicais je sais toujours pas) obtient son indépendance après plusieurs années de lutte contre les autorités portugaises. Le parti d’indépendance, le FRELIMO, déclare la naissance du Mozambique et prend les rênes du pays. Presque parallèlement un mouvement rebelle, le RENAMO, soutenu par le régime apartheid sud-africain nait à son tour et entame une lutte armée destinée à faire tomber le régime communiste du FRELIMO. Pendant près de 15 ans le pays connait une guerre civile qui fait près d’un million de morts et paralyse le pays. En 1992 un accord de paix est signé entre FRELIMO et RENAMO, et ouvre une période de stabilité. Mais bon depuis quelques mois des partisans de la RENAMO fatigués par des élections par forcément hyper transparentes et par un partage des richesses pas forcément hyper juste, ont décidé de reprendre certaines activités deguerilla à savoir kidnapping et attaque de bus à la mitraillette sur la route principale du pays. La province de Sofala au centre du pays, fief historique de la RENAMO connait donc à nouveau des troubles depuis quelques semaines. Bref revenons à nos moutons. A Quelimane nous sommes à la limite avec cette province de Sofala et la route qui connait ces récentes attaques est bien celle que nous voulons emprunter à bicyclette. Et là vous commencez à voir le souci.Depuis 2 semaines nous regardons doncle 20h en portugais pour suivre l’évolution du schmilblick et nous discutons régulièrement de ce problème avec les gens que nous croisons.  Une chose est claire pour eux il est impossible de traverser la zone à vélo, la seule solution est de prendre un bus qui sera escorté par l’armée sur les endroits à risques. Nous pesons le pour et le contre de toutes les solutions : prendre le bus ? contourner la zone en passant par le Malawi et le Zimbabwé ? prendre un avion ? passer par une route de montagne à l’ouest du pays ?  A Quelimane après moults débats nous optons finalement pour l’option du bus. Voilà donc ce que nous attendons à Quelimane ces jours-ci : le bus !
Le départ est fixé pour Samedi 4h du mat’ . A 2h30 le réveil fait son boulot et nous découvrons sur le téléphone d’Alex de bien mauvaises nouvelles : le convoi de bus de la veille escorté par les militaires a été attaqué et la France a perdu le match aller de son barrage pour la coupe du monde. Y’a des matins comme ça où il vaut mieux pas se lever. C’est donc passablement nerveux que nous nous rendons à la gare routière (à cause de l’attaque de la veille pas à cause de Franck Ribery). Nous tentons bien quelques blagues mais le cœur n’y est pas vraiment et puis il est 3h du mat’ aussi. A la gare l’ambiance nous détend un peu, l’inquiétude ne se fait pas vraiment sentir ni chez les passagers ni chez les conducteurs. La perspective de traverser une zone où des gusgus en treillis tirent sur les bus ne semble pas entamer la bonne humeur du coin. Trop de sensiblerie chez les occidentaux ! L’arrivée de notre chauffeur de bus finit de nous rassurer. Lui on l’appelle « Patrao », le Patron. Un style de conduite à la Fast and Furious 4 et une classe à la James Bond. Patrao fait vrombir le moteur et nous voilà partis. Il fonce, klaxonne, débraye, double en montée, klaxonne, double dans un virage, évite un vélo, écrase un singe (triste mais vrai), esquive un contrôle de police puis bougonne à un deuxième, traverse le Zambèze et grimpe les montagnes. Bref en moins de temps qu’il n’en faut pour le dire (d’autant plus que Patrao ne fait pas de pause, « les pauses c’est pour les nazes » croyons-nous lire dans ses yeux) nous voilà à Muxungue, ville de départ de l’escorte militaire. 

Notre escorte, prête à intervenir!

A Muxungue l’ambiance est pour le moins étrange. Une marée de bus et de camions attendent gentiment le départ d’un impressionnant dispositif militaire pendant qu’une nuée de vendeurs à la sauvette slalome entre les véhicules pour proposer coca-cola et noix de Cajou. Nous sommes réellement  stupéfaits par les moyens militaires mis en place : soldats, véhicules blindés, mitrailleuses à la Rambo, lance-roquette ! Rassurant ? Oui et non … Après une longue attente le convoi se met en branle nous sommes placés derrière un camion où deux soldats sont en faction, abrités derrière deminces meubles en bois. « A mon avis, ces deux bizus là, ils ont perdus au pile ou face ce matin » avance Côme. Dans notre bus l’ambiance est un peu moins détendue qu’au début du trajet et nous pareil… Même Patrao à l’air un peu plus concentré que d’habitude ! Sur la route pas un chat la zone est sacrément sauvage. Nous croisons plusieurs carcasses de voitures brûlées, bonjour l’ambiance ! Au moindre ralentissement  nos militaires sont à l’affut et on sent bien que la traversée de la région n’est pas tout à fait anodine. Quelques 90 km plus loin nous franchissons le fleuve Save point frontière entre la province de Sofala et celle d’Inhambane. L’escorte militaire prend fin et nous poussons un vrai soupir de soulagement. Patrao,impeturbable, reprend son rythme de croisière et nous jette quelques kilométres plus loin aux croisements entre la route principale et celle menant aux plages paradisiaques deVilanculos.Car bien souvent au Mozambique la frontière entre la galère et le kiff est bien mince ! A peine sorti de la zone mitraillette &lance roquette nous pénétrons dansla zone eau turquoise & sable fin. De quoi vous faire perdre la tête tout ça. Nous mettons le cap sur Vilanculos, ville touristique centrale du Mozambique. Effectivement il y a de quoi, une baie magnifique s’offre à nous, à marée basse les bancs de sable surgissent au milieu d’une eau parfaitement claire. Nous prenons nos quartiers dans l’auberge backpackers du coin totalement vide à cette période de l’année et tenue par un allemand.

Enorme festin en self catering. Difficile de se rendre compte à quel point on est heureux là!

Ouais on manque un peu d'affection parfois..

 C’est un sacré personnage celui-là il faut dire, c’est un vieux de la vieille de Vilanculos, il commente sa vie ici d’un air désabusé « Comment j’ai atterri ici ? L’illusion d’un paradis … et une succession d’erreurs ! » nousdit-il avant de partir d’un gros rire parfaitement germanique. Une pointe d’aigreur s’entend presque dans son discours, mais il faut bien dire que le pauvre bougre a connu récemment une grosse déception avec la descente en deuxième division de l’équipe de foot de Vilanculos.  Sale affaire ! Toujours est-il que nous nous sentons bien chez lui, nous profitons des délices de la plage et planifions une sortie snorkling pour le lendemain. Point d’orgue de notre journée, nous achetons un magnifique poisson de 3kg (un petit tarpon selon notre spécialiste pêche) que nous cuisinons au barbecue. Nous retrouvons le plaisir de faire notre propre tambouille ! Au petit matin, c’est donc une team Grande Echappée en forme olympique qui monte à bord du DolphinDows II, un frêle esquif chargé de nous emmener voir de plus près la population marine de l’archipel de Bazaruto. Nous partageons la journée avec un couple venu tout droit de Johannesburg pour des vacances de rêve à Vilanculos.Les fonds marins de l’archipel valent leur pesant de cacahuètes.Tout un tas de poissons aux couleurs et formes révolutionnaires se promènent joyeusement sous nos palmes (note technique : carangues, poissons perroquets, chirurgien, bonefishs, murènes, mérous..). A la sortie de l’eau nous discutons donc poisson porc épic, poisson lune et oursin, un peu impressionnés par ce que la nature peut produire. On en deviendrait presque philosophe.


Nous quittons Vilanculos avec regret le lendemain pour retrouver la route.. Nous pédalons nous pédalons mais notre esprit est ailleurs. Quelque part entre la France et l’Ukraine probablement ! Car même à 10000km  de la maison nous n’oublions pas nos devoirs patriotiques : celui de nous qualifier  pour la coupe du monde au Brésil (oui oui on dit « nous »)! Et ce soir c’est match.  L’objectif de notre journée est simple : trouver une maison équipée d’une parabole retransmettant le match.Notre quête nous occupe tellement l’esprit que des conversations improbables voient le jour :
« - Tu préféres voir un éléphant traverser la route ou qu’on se qualifie pour le mondial ?
-          Hum… Je prends la coupe du monde direct ! Mais pour un lion là je dis pas »

Evidement aucun n'a traversé, faux espoir

     Le soir venu nous faisons halte à Cheline. Pas de parabole ici mais nous retrouvons avec plaisir notre spot de bivouac préféré : une salle de classe d’une petite école d’un petit village. Un de ces soirs où l’on dort à l’air libre après avoir pris une douche sous les palmiers.
Le lendemain  matin nous apprenons que nos prières ont été exaucées et nous trinquons du thé à la santé de nos valeureux champions. Comme tout bons français après un lendemain de foot nous passons la journée à refaire le match. Effectivement nous n’avons pas vu le match mais nous ne sommes pas du genre à nous arrêter à ce genre de détail ! Bref arrêtons de parler de ballon rond la journée est également importante au Mozambique car aujourd’hui ce sont les élections municipales. Il faut vous dire que ça fait 2 semaines que les villes que nous traversons suivent le rythme des camions-sound system des deux partis. Des affiches s’étalent un peu partout dans les rues et les partisans distribuent allégrement casquettes et drapeaux. Bon il faut bien avouer que le combat semble bien inégal entre un parti gouvernemental suréquipé et celui d’opposition bien plus discret. De notre côté nous ignorons les clivages politiques et nous glissons tranquillement sur la route des vacances. Nous passons la nuit à Unguana une bourgade de taille moyen-plus dont nous ne gardons pas que des bons souvenirs. Un certain nombre de mauvaises rencontres nous font détester la ville: le prof de math bourré comme un coing limite agressif, le scorpion qui passe entre les pieds d’Alex et l’araignée grosse comme mon poing (et j’ai un gros poing). 

A 6h le matin, pas évident..


Nous passons la nuit sous le porche d’une maison et filons dès les premiers rayons du soleil vers des cieux plus chaleureux. Et quels cieux ! Il fait gris ce matin-là, chose suffisamment rare ici pour qu’on le mentionne. Ca pleuviote et ça vente pas mal, on se croirait presque en Bretagne.  Nous avançons lentement à cause d’un dieu Eole bougon qui a décidé de nous les briser (les jambes). Mais notre moral est à l’épreuve du vent et nous passons une journée magnifique. D’abord une jolie mozambicaine nous propose du lait de coco au déjeuner. Ensuite nous passons le tropique du Capricorne et franchement ça fait plaisir (à cette occasion Vincent dira une énormité géographique que nous ne mentionnerons pas par respect pour lui).

Grand moment avec tous nos potes!


 Enfin à l’arrivée à la ville de Morrembene notre ville étape du jour nous faisons la connaissance de Taka, un jeune volontaire japonais travaillant depuis 2 ans pour une ONG promouvant l’agriculture locale. En deux coups de cuillère à pot le voilà nous proposant le sol de son salon pour passer la nuit. C’est surtout l’occasion pour nous de partager nos impressions sur notre Mozambique adoré du genre
« t’as compris toi pourquoi les bières de 25cl coutent plus cher que celle de 50cl ? ». La maison de Taka n’est pas bien grande mais nous y entrons tous les trois largement  pour une nuit royale.

Ce bon vieux Taka, hôte de qualité


Le lendemain il fait toujours gris mais cela ne nous empêche pas de parcourir les derniers kilomètres qui nous séparent de l’océan indien et de la ville d’Inhambane, capitale de la province du même nom. Inhambane est une ville assez sympa, petite et aérée. Nous en faisons rapidement le tour et nous décidons de nous mettre en quête d’un internet café. Ici chercher internet est toujours une mission exaltante à l’issue aléatoire. Après une grosse de recherche, d’espoirs et de déceptions nous nous avouons vaincu pour cette fois. Nous décidons de nous remonter le moral autour d’une grosse soupe aux haricots et nous rencontrons Chana, artiste de la ville qui nous emmène faire un petit tour de la Maison de la Culture pour nous montrer ses peintures. Un peu de culture ne fait jamais de mal !


Une des oeuvres de Chana, notre peintre rasta


 Nous remontons sur nos bicyclettes direction la plage paradisiaque de Tofo, un des spots touristique les plus importants du pays. Tofo c’est un peu le Disney Land du touriste au Mozambique : plage de rêve, eau turquoise, logements et bars à gogo. 




 C’est la fin de la journée nous pédalons gaiement le long do bord de mer quand une Mercedes blanche s’arrête à la hauteur de Alex.  « Vous chercher un endroit où dormir ? Suivez nous ! ». Nous suivons et c’est ainsi que nous faisons la connaissance de Ricardo et Kathie. Il est italo-zambien et elle greco-sudafricaine, ils ont vécu au Botswana, en Zambie et en Afrique du sud avant d’attérir à Xai-Xai au sud du Mozambique où ils dirigent un lodge de luxe. Ils sont venus à Tofo prendre quelques jours de vacances avant de se lancer dans la furie de la haute saison touristique. Nous arrêtons nos vélos dans la villa qu’ils louent. : une belle maison dominant l’une des plages de Tofo, Quelques secondes plus tard nous voilà assis sur la terrasse à regarder l’océan indien venir lécher la plage et les rochers. Zou ! Nous recevons nos instructions : « prenez une bière, allez-vous doucher, prenez une autre bière, donnez-nous un coup de main pour guillotiner les crevettes  prenez une autre bière et venez manger». A vos ordres chef ! Nous sommes accueillis comme des rois (et encore on est même pas sûr que les rois sont aussi bien reçus).  A ce moment précis en prenant du recul sur notre situation, force est de constater qu’on a la belle vie : se gaver de crevettes marinées face à l’océan en sirotant des bières c’est pas si mal ! Ricardo et Kathie nous racontent leur vie africaine plongée dans le monde du tourisme. C’est l’occasion pour nous de de discuter pour de vrai et de poser toutes les questions qui nous passent par la tête. On se sent bien chanceux ce soir-là de tomber sur des gens aussi accueillants et généreux… Quelques bières plus tard nous continuons d’écouter les anecdotes les plus improbables de nos hôtes :  « si, si on vous jure notre chien est dressé pour chasser les éléphants ».

Papas et maman d'un jour!

ça commence à serieusement pousser tout ça


Au petit matin l’optimisme va bon train dans les rangs, nous profitons d’une journée de repos totale. Nous quittons notre nid de chez Ricardo et Kathie pour rejoindre le centre du petit village de Tofo. La ville, même en hors saison, est peuplée de blancs. Nous frôlons la crise cardiaque tout à coup propulsés dans cet univers touristiques (avouons-le ça nous fait plaisir quand même). Nous nous dégotons une petite auberge et passons le reste de la journée à  glandouiller. Le soir venu nous sortons nos habits de gala car Kathie nous a donné rendez-vous pour voir France – Afrique du Sud dans un bar. Nous voilà donc chantant gaiement La Marseillaise en voyant tous émus défiler les images du Stade de France. Nous perdons finalement le match, ce qui est la moindre des choses pour remercier nos amis Ricardo et Kathie de leur gentillesse. Nous nous remontons le moral à coup de bières, certains observateurs pourraient même dire que l’on aurait un peu forcé ce soir-là… Mais que voulez-vous nous sommes des patriotes !
 Le lendemain matin la journée suit à peu près le même schéma que la veille ( à un petit mal de crâne près peut être): repos du corps et de l’âme. Ricardo bien décidé à nous régaler jusqu’au bout nous invite à nouveau pour un barbecue gargantuesque. Bref tout va bien ! Nous planifions pour le lendemain une excursion en mer pour aller nager avec les requins-baleine la grande spécialité du coin. Inutile de vous dire que Côme à des étoiles dans les yeux depuis deux jours « non mais vous vous rendez compte les gars ? C’est le plus gros poisson du monde ! Genre jusqu’à 10 métres le machin ! Ca va être fouuuu !». Une affaire à suivre donc !

Aller, petit spoil, ça nous brûle les doigts.

Nothing to say....
 

Ilha de Mocambique - Quelimane : Entre mer et Montagne



Nos derniers jours à Ilha de Moçambique sont placés sous le signe du repos, du farniente comme diraient nos voisins italiens (= « ne rien faire du tout »). Nous profitons de la plage, du soleil, de cette petite ville où tout le monde se connait. On nous demande de nos nouvelles régulièrement.
-Alors Côme, cette malaria ça va mieux ? TudoBem ?
La nouvelle semble avoir fait le tour du village. Du moment qu’elle ne fait pas le tour du monde avec nous, tout va bien. Et puis notre grand invalide se remet peu à peu sur pied. Si la balance affiche toujours une perte de 6 /7 kilos, l’appétit revient. Il va même jusqu’à tenter les bulots que lui propose un petit vendeur de rue ! Et alors que nous discutions avec un type sur le trottoir, celui –ci nous offre sa plus belle poésie.
-Regardez ces bulots les garçons, vous voyez celui-ci n’a pas la même coquille que celui-là. Pourtant, le mollusque à l’intérieur est le même. Finalement, avec les blancs et les noirs, c’est un peu la même chanson. Nos coquille sont différentes, mais la ptite bête à l’intérieur est bien là même non ?
Chapeau l’artiste, t’as gagné ta place dans le blog !
Côme a sa sortie de l'Hopital, bien maigrichon

Vue des toits a Ilha des Mocambique

Vient ensuite le moment de quitter cette ile qui n’a su nous laisser indifférents. Nous décidons  de prendre un chapa (un bus local) pour gagner Nampula et éviter un trajet que nous avons déjà fait à vélo et ainsi gagner du temps. Et puis de toute façon Côme est encore incapable de faire deux coups de pédale. Nous attendons des heures des bus qui ne viennent pas. La chaleur est écrasante, nous commençons à nous impatienter lorsque surgit de nulle part un pick-up  conduit par un portugais qui vient se ranger devant nous. Notre ami accepte de nous amener jusqu’à Nampula pour pas un rond. Une aubaine. Nous restons ébahis devant tout ce confort que nous n’attendions pas.
-          Côme, ferme ta fenêtre il a mis la Clim’ !
-          La quoi ?? !
C’est ainsi que nous atteignons Nampula, grâce à ce sauveur sans qui nous aurions commencé à perdre patience. La 3ème ville du pays n’a absolument aucun intérêt si ce n’est qu’elle nous permet d’y trouver une connexion internet et tout ce dont nous avons besoin pour nous nourrir et nous loger. Parlons-en de ce logement. Ingénus que nous sommes, nous nous ruons dans une petite pension  à 2 km du centre qui n’effraie pas trop notre budget. L’endroit semble paisible, voire même agréable. Nous pouvons nous y reposer, Vincent sort même sa guitare et joue pour accompagner un prétendu chanteur, qui restera pour nous surtout un type fort sympathique mais ayant un poil abusé de bière locale et se sentant pousser des cordes vocales. Et la surprise du jour arrive au moment d’aller se coucher où nous nous rendons compte qu’il s’agit en fait d’un hôtel de passe..Et cette fois, la musique s’avère nettement moins mélodieuse, surtout en ce qui concerne notre voisin de chambre. 


Nampula, si ce n’est pas le paradis, c’est par contre notre point de départ en train pour rejoindre Mutuali. Et oui, nous tentons l’expérience du train local pour nous retrouver 10 heures plus tard dans les montagnes, plein Ouest, pas bien loin de la frontière avec le Malawi. A 5h du matin donc, nous hissons  nos vélos dans le wagon de marchandises entre des oranges et des poussins et filons en bout de train pour trouver 3 places en 2ème classe. En grimpant dans le wagon, nous entendons des « par ici la première classe ! ». « Et non ! Nos oreilles ressemblent peut-être à des dollars mais on vous entend les gars. Et que ça vous plaise ou non, il faudra  nous compter parmi vous pendant ces 10 heures ! ». Puis la cloche retentit, le train démarre et atteint très vite sa vitesse de croisière, à savoir un bon 30km/h. 

La verdure dont on vous parlait

Le confort à bord est plutôt correct contrairement à ce à quoi nous nous attendions. Tout le monde est calme et attend patiemment son arrêt. En revanche lorsqu’arrivent ces fameux arrêts, là c’est l’effervescence. Le train est assailli par une nuée de jeunes vendeurs qui, par là fenêtre tentent de nous refourguer tout et n’importe quoi ; des beignets, du pain, des boissons, des légumes, des poules, des patates…. Nous nous demandons encore qui pourrait bien acheter ça. Quoique, avec un peu d’imagination….. :
-Allez les gars on s’active !! chacun à son poste, Vincent, prépare le réchaud, Alex, plume le poulet, j’achète des légumes. On va se concocter un Tajine des familles les enfants, à en faire saliver tout le wagon !
(Nous espérons que la maman d’Alex relèvera la référence au tajine, véritable experte dans le domaine !)
Plus modestement, nous nous contentons de quelques morceaux de pain et de beignets à la pomme de terre. Les paysages défilent et commencent à changer. De hautes montagnes sortent peu à peu de la brousse dont la palette de couleurs change elle aussi nettement. La savane sèche et plutôt  à dominante jaune laisse place à des dégradés de vert à perte de vue. Et toujours ces immenses rochers émergents du sol, gris et dépourvus de végétation. Nous sommes en altitude, à plus de 500 mètres, ce qui explique des températures plus douces, une eau plus abondante et toute cette verdure qui nous entoure. 

Les coups de Soleil d'Alex, la quotidienne..

Nous arrivons en fin de journée à Mutuali. Dans ce petit village étape  nous passons la nuit dans une charmante pension tenue par une mère et ses trois enfants qui semblent, seuls, tenir les rennes, la mère étant surtout occupée à bavasser avec les clients et ses copains de passage. Le lendemain, une superbe étape de piste d’une soixantaine de kilomètres nous dévoile les beautés de la région et nous amène à Lioma où nous rencontrons le pasteur du village qui nous permet gentiment d’investir les bancs de l’Eglise pour la nuit.


Ahhhh, la ça va mieux!
Vincent: "A part a la messe, j'avais jamais dormi dans une eglise" (Sale gosse va!)
 
 Sur le chemin nous serpentons entre ces montagnes si vertes, pédalant parfois à l’ombre de quelques eucalyptus ou à travers de minuscules villages où des dizaines de sourires et de pouces en l’air semblent nous dérouler le tapis rouge. Le seul coin d’ombre dans ce beau tableau tient à des rencontres animales que nous n’espérions pas : D’abord un gros scorpion noir sur la route, puis une énorme araignée apparemment tentée par une nuit douillette avec Vincent. 

Malgré les apparences, une station essence!
En fait c'est juste un crabe un peu bizarre non ?

Le lendemain nous prenons à l’aube la direction de Gurué ou nous prévoyons une journée pour y faire un trek dans les montagnes. La route est de plus en plus belle. Nous avons le sentiment de changer de pays. Alex, sans doute plus inspiré que nous à ce moment-là tente une comparaison avec les environs d’Angoulême. Pourquoi pas. On a tout de même tous pensé au carton rouge à ce moment-là. La ville, qui conserve quelques traces d’une architecture coloniale est perchée en haut d’une colline entièrement assiégée par des plantations de thé qui tapissent d’un vert éclatant toute la région. Plus d’une douzaine de fabriques distribuent ce thé dans tout le pays.

La Grande Deconnade, Trois guignols autour du Monde

Ahhh, là d'accord!

 Gurué, c’est aussi l’eau que nous buvons depuis notre entrée au Mozambique, un peu comme si nous entrions à Evian ou à Volvic. En tout cas, nous avons grand soif de découvrir toute cette nature qui entoure les lieux. En ce qui concerne le logement nous trouvons une mission catholique grand luxe qui nous accepte dans le jardin avec nos tapis de sol. C’est par téléphone que nous avons affaire au père Marcos qui, dans un français parfait, nous confirme son autorisation. Ce fameux Padre Marcos, jamais nous ne l’avons vu. Tout le monde en parle ici mais il restera pour nous une simple voix à l’autre bout du fil. Nous dormons donc dehors certes mais pouvons profiter du luxe de ce lieu qui a l’habitude d’accueillir des groupes pour des séminaires ou autres manifestation de ce type. C’est ainsi, entre deux douches dans une VRAIE douche, dans une salle de bain éblouissante de propreté, que nous faisons la connaissance d’un groupe de zimbabwéens en réunion ici pour du business agro avec le Mozambique. Vincent, trop triste d’avoir quitté son stage chez Danone, leur offre même une leçon d’utilisation d’Excel. Jusqu’au bout du monde le mec reste dans le business ! Le soir venu, toute cette belle brochette s’en va diner ensemble dans la « salle commune » d’un repas copieux et convivial. Tellement copieux que nous peinons à rester debout pour atteindre nos lits. 

Fun les élections municipales au Mozamique

Dès 6h le lendemain nous filons prendre un riche petit dej avant de grimper sur nos vélos pour atteindre la fabrique de thé UP4, la casa de Noivos (une jolie maison coloniale) et les cascades où nous prévoyons de pique-niquer. Suivant les indications de notre bouquin, nous grimpons sur 10 kilomètres entre les bambous et les plantations de thé à flanc de montagne, jusqu’à arriver à cette casa de Noivos, qui est totalement abandonnée et dévorée par la végétation. Plus loin, cul de sac et pas non plus de cascades. Un type occupé à cueillir des feuilles de thé nous indique que ce que nous cherchons est situé sur l’autre versant de la montagne ! Résultat, il est 11h et nous sommes à notre point de départ, à savoir dans le centre-ville de Gurué. C’est reparti, et cette fois nous finissons par atteindre l’énorme fabrique de thé UP4 que nous cherchions. Mais impossible de la visiter. Quand aux cascades, il faut laisser les vélos au gardien de la fabrique et continuer à grimper à pied pendant 1h30. Décidément.. Nous partons donc avec nos bouteilles d’eau et notre pique nique, bien décidés à trouver ces cascades. Nous ne sommes pas déçus, le trek se révèle magnifique, dans un paysage qui devient très vite une jungle entourant ces plantations de thé qui n’en finissent plus. Plus nous montons plus la vue sur la vallée devient imprenable. 



Nous n’échangeons pas un mot durant toute la montée, hypnotisés par ce que nous voyons. Puis les cascades apparaissent enfin, d’abord en bruit de fond puis sous nos yeux, ajoutant le dernier coup de pinceau qui manquait à la perfection du tableau.
-Là, les gars, si c’est pas le paradis, ça y ressemble ! Lâche Côme.
S’ensuit un bain dans les bassins d’eau froide entre les rochers de la rivière, un bon pique nique végétarien et un gros roupillon sur la roche, à quelques mètres du vide. Puis nous attendons les dernières heures du jour pour redescendre et profiter des jolies lumières de fin de journées africaines. Nous arrivons rincés par cette longue journée et rejoignons nos amis pour à nouveau diner autour de cette grande table. Nous finissons par nous écrouler dans les bras de Morphée, rêvant de nos découvertes du jour.

Bim, carte postale!

Ils s'appelaient Les copains d'abord, les copains d'abord..


Puis il faut repartir et rejoindre en 5 jours la ville de Quelimane, capitale de la Province de Zambèze (du fait du passage du célèbre fleuve), sur la côte. La distance n’est pas des moindres et nous devons aligner chaque jour plus de 80 km. Durant ces 5 jours nous redescendons peu à peu ce que nous avions grimpé pour atteindre la région de Gurué. En réalité nous savons que chaque jour nous perdons quelques mètres d’altitude mais l’impression reste celle d’une route extrêmement vallonnée qui met nos jambes à rude épreuve. Jamais nous ne roulons sur du plat, chaque descente est sanctionnée immédiatement d’une longue montée, c’est très frustrant. Cela finit par se calmer à l’approche de Quelimane. Ces étapes sont un peu ce que l’on commence à nommer des « étapes de routine ». Ces journées où finalement le paysage est joli mais identique à celui de la veille et pas non plus transcendant, ces journées qui commencent par un réveil difficile à 5h du matin, 50 bornes puis un pique-nique  sous un manguier, 35 bornes et un débarquement dans la Guest House la plus miteuse du bled étape. Ici en l’occurrence d’abord Errego, Mugeba, Malei,Nicoadala et enfin Quelimane, notre objectif. Non effectivement nous ne sommes pas tous les jours à la plage ou au bord d’une cascade dans la jungle.

3 kilos d'ananas, l'affaire d'un gouter pour la Grande Echappee

 Et ces journées il faut les occuper, trouver des stratégies plus intéressantes que celle de compte les baobabs. Alors nous nous repassons en boucle le contenu de nos Mp3, nous écoutons les émissions de Franck Ferrand notre nouveau pote historien d’Europe 1 (autant vous dire que maintenant au diner ça parle Louis  XIV et préhistoire), ou encore cherchons dans le décor un point de détail qui pourra occuper notre esprit pour les prochains kilomètres. Heureusement ceux-ci finissent par arriver. Un gros serpent mort sur la chaussée, un autre, plus petit qui traverse sous le roues de Vincent, une plantation d’ananas, une usine de conditionnement du riz, ou encore un ou deux vendeurs complètement improbables comme ce bonhomme qui tentait l’autre jour de nous vendre un lapin vivant. Ou encore de drôles de scènes comme celle où Alex, s’improvisant photographe scolaire, chercha à placer toute une ribambelle de gamins devant une fausse pub « Coca Cocla » peinte maladroitement sur un mur.
 
Ils sont pas prêts d'ouvrir un Mcdo..
 Un autre midi nous atterrissons à l’heure du déjeuner dans une école primaire, alors que les élèves sortent avec leur copie d’un examen. Les profs nous ouvrent spécialement une salle de classe pour la pause. Et le soir de cette même journée c’est dans un bâtiment gouvernemental réservé à la taxation du bois qu’un homme d’une quarantaine d’année nous accueille pour diner avec lui et passer la nuit. Alors n’exagérons rien en parlant de routine, chaque jour à son étincelle et son anecdote à raconter. Et puis finalement, le recul et un regard plus objectif sur ces étapes nous montre qu’elles sont aussi le propre d’un voyage à vélo. Jamais nous ne serions passé dans cette région, jamais nous n’aurions partagé un bout de la vie de tous ces gens autrement qu’à vélo.  En fait c’est peut-être un peu ça quand on voyage à vélo, on prend de l’information en permanence, on voit, on sent, on entend en continu. Plein de bonnes et de mauvaises choses, à nous de faire le tri !

La routine dont on vous parlait :), ça va y'a pire...

 Bref arrêtons  la philosophie à trois meticals car nous arrivons à Quelimane capitale de la province de Zambezia mais également capitale de la bicyclette. Ici les taxis sont à vélos. Autant vous dire qu’on va se faire du blé ici !  La vie est plutôt petite et aérée, on y retrouve à nouveau un niveau de vie plus élevé qu’à la campagne pour le plus grand malheur de notre portefeuille (mais la joie de nos papilles se régalant de gâteau au chocolat). Quelimane c’est un point important pour nous car après avoir traversés les provinces de Cabo Delgado, Nampula et Zambezia nous en avons terminé avec le Nord du Mozambique. Cap au sud maintenant ! 

Allez une derniere, on ne s'en lasse pas de cette belle randonnée!