Le lendemain matin c’est vendredi, vendredi 13. Nous ne
sommes pas superstitieux de nature mais quand notre confort dépend de la météo,
de l’environnement et des rencontres faites sur le chemin, on commence à
s’intéresser un peu plus au sort que nous réserve la providence. Les choses
commencent assez bien en tout cas : nous nous réveillons avec un beau soleil qui a
fait sécher nos toiles de tente. L’extérieur du moins, l’intérieur reste quant
à lui bien moisi. Le petit déjeuner est vite avalé et le matos emballé. Pas de
temps à perdre, les vagues de Biscarosse nous attendent. 30 km plus loin, nous
sommes déjà arrivés. Juste le temps d’acheter un ballon de foot et nous voilà
sur la plage : les vacances commencent… Pour 2 heures au moins en tout
cas : le temps de pique-niquer, de se baigner et de taper un petit foot ou
plutôt et de se rendre compte que nos jambes ne sont plus bonnes à faire autre
chose que du vélo. Et c’est reparti. Et oui, on ne va pas coucher la non plus. Un
petit plouf dans l’espace douches publiques vue sur mer de la municipalité qui
se transforme en salle de bain de crasseux pour l’occasion et nous revoilà les fesses sur le vélo,
propre comme des sous-neuf. Puis c’est l’arrêt au stand chez Macdo pour
recharger les batteries (au sens propre et figuré) et raconter un peu notre vie
sur internet. On resterait bien encore quelques heures au Fastfood américain ou
les dessert glacés et la climatisation nous incitent à lever le pied mais il
est 18h30 et il reste quand même 40km à
parcourir pour atteindre notre point de chute : Mimizan Lake. Cette route
est celle de tous les records. Avec une moyenne de 26km/h, nous réglons son
compte à l’étape en à peine 1h30. C’est passé tellement vite que l’on n’a pas
eu le temps de voir le paysage des landes pourtant magnifié par le coucher du
soleil. « Il va falloir ralentir les gars parce que sinon on va être à Madrid
demain soir et on risque de s’emmerder un peu ». Les bonnes blagues vont
bon train. Sur l’étape du jour Alex a
aussi réalisé un record personnel de vitesse 54km/h. « Je vous jure les
gars c’était sur du plat en plus ! ». Ses collègues ne sont pas
dupes. Ils savent bien que seule une descente a pu mener les 90 kilos et quelques
d’Alex à cette allure. On clôt tout de même cette conversation en se disant
qu’il faut être prudent et ne pas oublier de freiner dans les descentes qui
représentent finalement le principal danger de l’aventure. Nous arrivons donc à
Mimizan pour le 20h. Bin non pas le journal, c’est du camping !
Non le 20h
de la nuit qui tombe et de l’apéro qui se prépare.
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Là-baaaas, au Connemaraaa! |
Ce soir c’est bière et chips
et on a l’honneur de manger sur une table (nous sommes sur une aire de
Pique-Nique). Ce petit luxe nous réjouit. Manger sur une table, il n’y a pas de
doute c’est bien. On n’éparpille moins notre barda que sur notre bâche de 12m
carré et puis ça donnerait presque envie de manger proprement… Presque !
Le souper est agréable. Côme qui affirme vouloir ouvrir notre champ des possibles
nous a sélectionné un risotto de la mer surgelé Super U. Et bin franchement ce n’était pas mauvais.
Effectivement ça change des conserves…
Le 14 septembre est un autre jour. Un jour gris. Le réveil
sonne à 8h30 comme presque tous les matins (Nous sommes en vacances mais n’abusons
pas trop quand même). Encore une fois, camping sauvage oblige, il faut faire les
petits besoins (et les autres) dans la nature. C’est chiant mais pas vraiment
le choix. Alex part donc de bon matin à l’abri des regards (de ses potes oui
mais des joggeurs matinaux pas toujours). Plus tard dans la matinée, ce qui
semblait être un local poubelle se révèle être des toilettes publiques. Et
c’est Alex qui fait la découverte ! Fort bien me direz-vous mais notre
protagoniste n’y a plus rien à y faire. Reste à voir si notre homme est assez « grand
prince » pour en avertir ses deux compères qui viennent de finir café et
pruneaux d’Agen et commencent à se tortiller en envisageant les différents
bosquets qui s’offrent à eux. Mais le confort de deux camarades de Tour du
monde, ça n’a pas de prix et la décision est vite prise. Aussitôt dit, aussitôt
fait… En guise de remerciement, Côme juge bon d’expliquer dans le détail à Alex
le système de nettoyage automatique des WC qui en font un petit coin 4 étoiles
(oui oui, on a déjà créé une échelle de qualité). Alex est heureux pour ses
amis !
Puis vient l’heure de la douche, ou plutôt des ablutions dans le lac. Et
aujourd’hui c’est jour de fête, on change de gel douche. De prime abord, Alex
et Vincent trouvent le choix de Côme un peu décevant : « Oh non Côme,
tu nous as troqué un gel douche fraicheur extrême contre un truc à l’amande, on
va sentir la frangipane ! » Mais Côme toujours Comme ne se laisse pas
démonter et argumente : « Mais non les mecs, c’est du lait
d’amande douce, vous allez voir, on va sentir comme chez le coiffeur ».
Mouai… Côme il est Côme ça parfois -jeu de mot MDR-. C’est un garçon pas comme
les autres.
20 bornes plus loin nous sommes au Super U. Et ouai encore... D’ailleurs on se
dit que le Super U, ça aurait pu faire un Super thème pour notre voyage… En
tout cas nous, ça nous passionne ! Cette fois-ci le plaisir de faire les
courses est de courte durée car le magasin ferme ses portes. Il faut aller
vite, très vite ! 3 repas pliés en
moins de 5 minutes et sans liste s’il vous plait ! Allez bim, un nouveau
record pour la Grande Echappée ! Sur le parking on reprend notre souffle
et commence alors une conversation très intellectuelle sur nos lectures :
- Le premier : « Pas mal la fin de mon bouquin Le Club des
incorrigibles optimistes, en fait ils s’étaient connus au KGB et du c’est pour
ça qu’il ne peut pas le blairer, c’est un peu la clé du dénouement »
-Le second: « Ah t’es relou, je voulais le lire, ça se fait pas. Est-ce
que je te raconte la fin de la Bible moi !? »
-« Moi je m’en fou de toute façon après je vais lire Harry Potter. La
coupe de feu en Tanzanie ça va être nickel !
- Le premier « Oh le boloss, tu l’as déjà lu 10 fois en plus. Moi je pense
que là je vais commencer la Théorie de l’évolution de Darwin »
-Le deuxième : « Bin oui c’est ça t’as raison, je te mets au
défi de lire 3 pages ! »
Pas de doute nos trois voyageurs savent parler littérature…
20 km encore plus loin, nous attaquons ce que nous avons acheté pour le
déjeuner. Après cela, Vincent et Côme qui veulent se rassurer sur leur niveau
futballistique décident d’affronter deux espagnols qui imposent leur style sur
un mini terrain de foot. Le match est endiablé, les dribles s’enchainent et on
assiste à un des plus gros France Espagne de tous les temps. Après 15 minutes
de jeu, le score est de 3 partout et les parents de Javier, 8 ans et Mario 9
ans sifflent la fin du match en appelant leurs enfants à table. Décidemment, il
va vraiment falloir se remettre à niveau avant de faire des passes sur les
pelouses du Retiro.
Encore 30 km et nous arrivons dans le centre-ville de Soustons. Au troquet du
coin (Le bar basque), nous faisons la connaissance d’un autre cyclotouriste. Il
s’appelle François, il a 55 000 kilomètres au compteur de son vélo et
surtout, il a 77 ans. Nous partagerons notre dîner avec ce Charentais, Boucher
Charcutier à la retraite qui laisse sa femme tous les ans pendant les 3 mois
d’été pour parcourir les routes de France et d’Espagne. « Oh non ça ne la
dérange pas, elle s’occupe du chien et moi je fais du vélo : chacun ses
loisirs. » Sacré François !
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77 ans, seuls les jeux de société lui résistent désormais! |
Finalement nous décidons de camper en compagnie de notre nouveau pote
François. Un orage plutôt solide se prépare et sous les conseils des locaux du
bar basque du coin nous nous abritons au centre nautique de Soustons déserté en
basse saison. Spot de rêve au bord du lac, des grandes tentes vides sont déjà
montées et n’attendent que nous. Nous engloutissons le diner et filons nous
coucher. Dehors le vent souffle fort et la pluie mouille salement, mais nous
nous endormons bien au chaud auprès de nos vélos qui pour une fois ont le droit
de dormir dedans. Grosse nuit, seulement interrompue par le bruit d’Alex
éclatant, d’un coup de Bible bien senti, un insecte volant non identifié, une
préparation à l’Afrique en quelque sorte ! Au matin la nature sèche paisiblement
et nous nous éveillons en découvrant que François nous a ramené croissants et
pains au chocolat pour nous donner la pêche. Sympa le François ! Nous
remballons ensuite nos affaires et nous nous préparons physiquement pour la
première étape du jour : parcourir les 500m qui nous séparent du bistrot
de Soustons où François semble bien décidé à nous payer des godets. Nous nous
attablons finalement tous les quatre autour de quelques cafés car admettons-le,
la bière à 11h du matin ça fait pas sérieux. Notre curieux équipage attire
l’œil de René un client du café qui discute 5 minutes avec nous. Intrigué par
la présence d’un septuagénaire à notre table il finit par lui demander son âge
et fronce les sourcils en apprenant la réponse : 77 ans comme lui… S’ensuit
une épique chamaillerie entre François 77 ans et 55 000 km au compteur et
René 77 ans ancien rugbyman et actuel pongiste (ping-pong tout ça tout ça) pour
savoir qui tient la forme la plus étincelante. Les grosses vannes fusent sous
notre regard enchanté et nous sommes finalement obligés de déclarer un match
nul. Au bout du compte c’est nous qui sommes les plus impressionnés par ces
deux grands père qui ont une pêche olympique. Ça donne des idées pour la
suite !
On finit par dire adieu à notre François pour nous diriger vers
Hossegor. Il était temps, notre vélo commençait (presque) à nous manquer !
Hossegor, temple de la coolitude : planche de surf, cheveux long et teint cuivré.
A peu près l’opposé de notre style actuel : bronzage de cycliste, sandales
à scratch et tâches de mayo sur le t-shirt… A l’aise comme des poissons dans
l’eau quoi ! Sur la plage les sauveteurs beaux gosses ont hissé le drapeau
jaune. Effectivement il y a des belles vagues et les surfeurs sont au
rendez-vous. Qu’à cela ne tienne, Alex et Côme sont prêts à relever le
défi et se décident à aller louer des planches. « Non mais oh !
On va voir de quel bois se chauffe La Grande Echappée ! » Pendant ce temps-là Vincent prend son courage
à deux mains et affronte seul les surfeurs d’Hossegor sur un front non moins
délicat : le bronzage (en fait c’est une manière de dire qu’il n’a pas
agité ses fesses de l’après-midi…)
Au magasin de planches la charmante Marilou calme les ardeurs de nos
deux héros :
-
« Pour le moment les vagues sont un peu
trop shortbreak, revenez dans une heure ça sera plus smooth
-
Ah bon bah d’accord alors. »
Heure utile au demeurant car
elle nous a permis de découvrir les échasses landaises, sport typique de la
région et qui fera l’objet d’un futur article sur ce blog (bande de petits
veinards).
Finalement les planches sont louées, et Alex et Côme enchainent les
vagues avec la vivacité du faucon et le courage du tigre. Rouleau arprès
rouleau, vague après vague. Deux heures plus tard les surfeurs d’Hossegor
sortiront de l’eau mi-dégoutés et mi-admiratifs, en affirmant je cite « 15
ans de surf et je n’ai jamais vu un tel style, chapeaux les artistes »
|
2 Guignols en terre inconnue |
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Le spot idéal pour sortir nos poubelles! |
Nous remontons ensuite sur nos
vélos pour une journée de repos bien méritée à Bayonne avant de franchir enfin
notre première frontière qui nous attend depuis quinze jours. A Bayonne nous
accueillent les grands parents de cette vieille branche de Sara, à nouveau nous
sommes traités comme des rois… on va finir par s’habituer au luxe si ça
continue ! La journée de pause à Bayonne se résumera finalement à regarder
la pluie tomber par la fenêtre. Nous comprenons que pour notre court passage en
pays basque français puis espagnol il nous faut revoir notre échelle de
météo : lorsqu’il pleuviote au pays basque il faut considérer cela comme une
journée de beau temps, lorsqu’il y a une éclaircie comme un jour de canicule.
Nous reposons donc nos jambes bien au chaud, et nous rongeons un peu notre
frein. Cela fait plusieurs jours que nous parlons du passage de frontière, il
nous tarde de retrouver l’Espagne !
|
" Les Landes c'est vachement bien ! |
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Restaurant 3 étoiles |
Le lendemain nous partons de bonne
heure : objectif San Sebastian. Nous visitons au pas de course Bayonne, il
pleut de manière abondante et c’est l’occasioin pour Alex d’exhiber son
magnifique poncho de pluie qui lui donne un style inimitable (En écrivant ces
mots je vois déjà Alex me dire : « Vazy t’abuses c’est pas si
pire »). Bref nous nous élançons vers l’Espagne sur une départementale
assez moche mais qui a le mérite de nous
faire traverser ces villes qui sonnent comme l’été : Saint Jean de Luz,
Ciboure, Hendaye. Juste avant Hendaye
justement nous quittons la départementale pour suivre une bien belle route sur
la corniche d’Urrugne. Nous gravissons à 10km/h les falaises verdoyantes
tombant sur une mer bien agitée, mauvais temps oblige. Au sommet de la corniche
la pluie nous laisse un court répit et
le ciel nous offre même un rayon de soleil, Ah tiens t’es toujours là
toi ? A peine sommes-nous repartis que la pluie revient de plus belle nous
caresser les extrémités. Nous trouvons refuge à Hendaye pour avaler notre
traditionnel et gargantuesque déjeuner que nous nous permettrons même de
terminer dans un parking pour nous abriter de la pluie et du vent.
Nous sommes
désormais à 3 kilométres de l’Espagne, et ça c’est chouette. Nous passons la
frontière une première fois sans nous en rendre compte puis revenons sur nos
pas pour faire les guignol au pied du panneau (et oui on ne sort pas tous les
jours de France). Nous voilà en Espagne, adieu la France. Douce France qui dans
son désespoir de nous voir partir fait tomber sur nous une montagne d’eau qui
mouille bien, sympa.
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Le voyage commence ici, en quelque sorte. |
Nous connaissons bien l’Espagne mais nous galérons tout de
même à nous orienter. Difficile notamment de faire le tri entre les routes
communales, les routes départementales et les grosses nationales qui tachent.
Nous nous trouvons donc tour à tour sur de minuscules chemins serpentant dans
les collines pentues au mépris de nos cuissots fragiles puis sur des voies un
peu trop expresses où les camions semblent passer bien près de nous. A cela
s’ajoute une pluie qui ne diminue pas. Au bout de deux heures en Espagne nous
sommes trempés et un peu paumés sur la route de San Sebastian. Bravo les explorateurs…
Nous arriverons finalement à San Sebastian (vous voila rassurés) à la nuit
tombante et ce sont trois éponges qui poussent la porte d’une petite auberge de
jeunesse du centre ville. L’auberge est pleine de marcheurs des chemins de
Saint Jacques de Compostelle, ça sent le sport dans le dortoir…. L’ambiance est
donc assez sérieuse, mais aventuriers comme nous sommes et ne reculant devant
aucun sacrifice nous décidons d’aller fêter notre arrivée en Espagne en allant
boire des canas bien méritées. Nous retrouvons dans la rue un peu de
l’atmosphère espagnole que nous aimons tant. Après quelques bières en terrasse
notre moral est regonflé à bloc et nous rentrons à l’auberge dans la joie et la
bonne humeur. Bonne humeur que ne partagent probablement pas nos colocataires
marcheurs qui nous le ferons payer dès le lendemain matin en partant tous plus
tôt les uns que les autres … Nous mais franchement qui à l’idée de partir
marcher à 7h du mat, sous la flotte en plus ? Notre réveil est quant à nous
plus tardif, plus lent et plus lourd. A midi nous sommes enfin dehors et nous tâchons
de mettre de l’ordre dans nos idées pour savoir quelle direction prendre et
comment éviter de se manger trop de ces collines basques qui grimpent
sacrement. Nous mettons le cap vers le sud ouest et nous visons de camper
autour de lacs que nous espérons accueillant. Nous voilà enfin on the road à un
bon rythme malgré les côtes. A l’heure du déjeuner nous arrivons à Tolosa. Un
certain Joanes accoste Côme dans la rue. C’est un cyclotouriste aguerri :
13 mois de l’Alaska jusqu’en Argentine …
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Chez Joanes, Côme hésite sur le lit à choisir |
Effectivement aguerri ne semble pas un
adjectif exageré ! Joanes nous propose de nous accueillir chez lui et puis
de faire tout ce dont un voyageur peut rêver : manger, doucher, laver,
dormir, discuter. 15 secondes de réflexion plus tard et nous voilà assis dans
la cuisine de Joanes. Avec lui c’est simple c’est « Faites comme chez vous
tranquilo tranquilo ». Tranquilo donc nous l’écoutons nous raconter son
voyage passé et lui nous écoute raconter notre voyage futur. De manière plutôt
marrante chacun envie l’autre : nous rêvons de pouvoir dire « j’ai voyagé
à vélo » et lui de pouvoir dire « je pars à vélo demain ». Mais
Joanes est vraiment la crème de la crème ! Non content de nous
nourrir/héberger/laverlesvêtements/laverlespiedsquipuent, il décide de nous
faire découvrir la vie de Tolosa. A première vue la ville ressemble à toutes
les villes basques que nous connaissons grise et verte, mais il semble qu’il
fait bon vivre ici ! Nous finissons dans un improbable ciné-débat sur la
place de l’automobile à Tolosa. Le débat est en basque ce qui nous permet de
constater le fossé qui existe entre le basque et toutes les langues terrestres.
Vincent ajoutera même dans une mauvaise blague « non mais quand ils
écrivent sur le pc on dirait qu’il se sont endormis sur le clavier ».
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En image, la blague du jour |
Une
très belle journée à Tolosa, tranquilo tranquilo donc ! Mais Joanes est
vraiment la crème de la crème le soir il met en branle le réseau des
cyclotouristes basques pour nous trouver un logement pour le lendemain.
Aussitôt dit aussitôt fait, nous voilà attendu à Vitoria le lendemain par un
couple de voyageurs super-aguerris (ça veut dire encore plus que Joanes).
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Joanes en pleine explication de pelota mano |
Avant
de partir le lendemain Joanes nous indique l’itinéraire à suivre jusqu’à
Vitoria. Très vite nous comprenons qu’aujourd’hui ça va grimper sec. Joanes a
beau dire « c’est une bonne montée, vous allez suer un peu mais tranquilo
tranquilo », quand c’est un mec qui a traversé l’Amérique du nord au sud
qui te parle de bonne montée, ça fait flipper. Bref nous partons vers le fin
fond du pays basque la fleur au fusil. Après 30km la montée commence. 10km de
lacets pas trop pentus, nous avançons lentement mais nous avançons. Une heure
plus tard nous franchissons la colline, que dis-je une colline ! un col !
une montagne ! un sommet ! Certes ce sommet culmine à quelques 652m
(on y tient au « deux » hein !) mais c’est notre première montée
longue et lente et ça se fête. Zou ! Œuf dur pour tout le monde, on a le
sens de fête nous. Ceci fait il nous reste encore 70km à parcourir pour
atteindre Vitoria. Nous avançons à notre rythme, ça continue à monter et à
descendre « euskadi-style » . C’est un peu comme l’histoire de
Sisyphe avec son rocher (ouais, ouais on est malades on place des références mythologiques).
On monte, on monte on monte le vélo et on redescend et tout est à recommencer. Au
bout de 80km dans les pattes on commence à sentir que nos jambes veulent nous
dire quelque chose, on a l’impression de rouler sur du chewing-gum
« malabar-style ». Après 110km de route nous arrivons à Vitoria, nous
y retrouvons Aurora qui nous accueille pour la nuit. Aurora c’est comme Joanes
mais en femme, la crème de la crème. Nous sommes traités comme des pachas. Elle
nous prépare notamment une somptueuse platrée de pâtes en forme de vélo (il
faut le voir pour comprendre le concept je pense …). Nous l’écoutons raconter
ses histoires de voyages à vélo et sans vélo. Pour faire simple, son mari et
elle ont voyagé partout. Mais quand on dit partout c’est vraiment partout. Ses
histoires commencent toutes par « Au Vénézuela… » ou « En
Afrique du Sud…. ». Très impressionant. Surtout Aurora sait raconter ses voyages,
simplement et sans chichis, ponctuant ses récits par la même exclamation
« Fue una pasada ! », comprenez « c’était
incroyable ». Du bonheur en boîte pour nous. On a l’air de quoi avec notre
petit millier de kilomètres qui se bat en duel tout seul ? Nous
voilà donc sur le point d’aller nous coucher bercés par ces histoires de
lointaines contrées, nos petits yeux se ferment et l’on arrive plus à
comprendre trois mots de castillan. Le lendemain, c'est Ruben, son mari pompier qui nous réveil. Il revient de sa nuit de travail et nous offre le petit déjeuner. Comme sa femme, il nous noie sous ses histoires de voyages à couper le souffle et pour nous réveiller nous emène en ville visiter le quartier historique. Vers midi, il prend même l'une de ses innombrables "bici" pour nous accompagner hors de la ville. C'est au pied d'un nouveau col qu'il nous laisse enfin.
-"Porque si siguo con vosotros seguro que voy a sudar :)"
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Ruben, pas bien grand mais d'une immense gentillesse |
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Entre la Castille et les Pays Basques, la frontière est aussi dans le ciel. |