Vitoria - Madrid: Le désert, les montagnes, et Madrid à l’horizon

          C’est en hommes nouveaux que nous quittons Vitoria, le pays basque et nos amis Ruben et Aurora, sans un certain pincement au cœur. Nous nous préparons à affronter l’Altiplano Castillan, aride en cette saison et assez désertique en ce qui concerne l’occupation par l’homme. Nous constatons notre avance sur l’itinéraire prévu jusqu’à Madrid et décidons de rallier Burgos, capitale gastronomique, en deux jours. Le paysage a complètement changé. Le décor luxuriant des montagnes basques, ses petits villages enclavés dans la vallée et ce ciel qui change d’avis toutes les deux heures, a laissé place à de grandes étendues dorées de champs de blés moissonnés. De temps à autre, surgi de nulle part, un petit village de 150 habitants profitant du passage d’un maigre cours d’eau pour y faire pousser trois tomates et deux concombre. Le soleil, en pleine journée nous brûle rapidement la peau et nous sommes forcés de boire beaucoup plus d’eau. 
Embouteillage en Castilla y Leon

Trafic fluide en Castilla y Leon


           Heureusement nous découvrons que tous ces petits villages, si perdus qu’ils soient, sont tous équipés d’une fontaine d’eau fraiche, de quoi remplir les bouteilles et nous doucher (me viennent à l’esprit des images de nous, nus dans des positions pas très commodes, nous douchant sur la place du village).  C’est dans ces mêmes villages que nous passons plusieurs nuits, accueillis à bras ouvert par les habitants, parfois par le Maire du village, qui se plient en quatre pour nous trouver un endroit pour monter le camp. Et c’est ainsi que nous nous retrouvons, un soir, à planter la tente sur la Plaza Mayor de Cubo de Bureba, sur les précieux conseils de Rafaël. Rafael c’est  un routier à la retraite qui s’arretait à chaque trajet dans ce village et qui a finalement décidé d’y construire une maison bleue. Plus pratique quoi ! Nous nous réveillons, le lendemain, les paupières encore collées, dans ce lieu si pittoresque, devant cette maison bleue, adossée à la colline (Parait-il qu’on y vient à pieds, qu’on ne frappe pas, que ceux qui vivent là, ont jeté la clé). Et Rafael, fidèle au poste, nous attendant sur sa bicyclette rose, bien décidé à terminer la conversation de la veille portant essentiellement sur les autoroutes reliant Burgos à Madrid… Encore un traquenard dans lequel Vincent tombe comme un bleu !

Vend campement, état presque neuf (les deux mecs en polaire bleue sont en option...)




Côme 1 - Le poisson 0
Juste avant Burgos, nous décidons de nous perdre un peu plus dans la nature en plantant la tente au bord d’un lac. A Villafranca, nous découvrons après 3 kilomètres d’une rude montée, une vallée immergée, plongée dans un calme religieux où seul un garde est là pour veiller au maintien de la beauté du lieu. C’est dans ce cadre bucolique que nous décidons de dormir. Et malgré les panneaux « prohibido acampar, banarse, pescar, respirar…Vivir ? », nous plantons la tente, nous douchons dans le lac et Côme en profite même pour sortir sa canne et pêcher une truite pour le diner.










Embalse del Alba
         
              La route reprend son cours, les étapes que nous prévoyons de 70 km en mesurant grossièrement avec les doigts sur la carte se révèlent être souvent bien plus longues. Il fait chaud, et même si nous évoluons maintenant sur l’Altiplano environ à 700 mètres d’altitude, les étapes ne sont jamais plates. Nos sacoches, elles, sont toujours aussi lourdes. Nous nous disons parfois que tout serait plus facile dans le monde d’Harry Potter. Hermione pourrait nous prêter son petit sac à main qui peut contenir un magasin entier, et les frères Weasley, leurs tentes magiques, qui, une fois à l’intérieur, n’ont rien à envier au château de Versailles.  Malheureusement, la réalité est moins rose comme le vélo de Rafael, et ce n’est pas en écoutant Le Plat Pays de Jacques Brel que nous allons faire l’autruche devant ces montagnes qui se dressent au loin, passage obligé pour atteindre Madrid.
Tout comme le paysage et le temps, nos lectures ont changé aussi. Un premier a décidé de se lancer dans la conquête de l’Annapurna avec Maurice Herzog pour se donner du courage, le deuxième se prend à rêver de froid polaire en abordant la vie d’Anna Karénine à St Petersbourg, et le dernier maintient que « figurez-vous qu’on apprend plein de choses en lisant la Bible. Et puis sinon, quand est-ce que je la lirai ? ».





On a pensé tricher avec ça mais finalement...
          Mais revenons au voyage. Nous passons à Burgos seulement quelques heures, le temps d’un déjeuner. Et c’est par l’expérience d’un délicieux kebab que nous votons nous aussi pour hisser la ville au rang de Capital de la Gastronomia Espanola. Este Kebab, fue una gozada ! Le soir même, après une après-midi à griller en plein soleil, nous atterrissons à Santa Cecilia. C’est un soulagement après 45 km sans pouvoir s’arrêter sous peine d’une attaque foudroyante par une nuée de mouches sans doute attirées par nos douces peaux de bébé qui en fin de journée sentent encore l’amande douce (Ref dernier article. D’ailleurs, le pot est bientôt vide, si vous avez des idées de parfums de gel douche à nous donner..). Cette Santa Cecilia, jamais nous l’avons croisé dans ce village pourtant si petit. En revanche nous faisons la connaissance du Maire qui nous fait visiter le pueblo.
- Encore un ! Maire alors ! ,tente l’un de nous après quelques verres au comptoir du bistrot où nous l’y rencontrons.
-Là ça devient limite, on devrait presque ouvrir un onglet dans le blog avec tes blagues les plus merdiques.
Pour notre défense, nous avons eu assez peu l’occasion depuis le début de nous détendre dans un bar autour de quelques verres. Et il faut bien avouer qu’après 80 kilomètres au soleil, ces trois misérables caňas ( l’équivalent d’un demi, un peu moins généreux chez les espinguoins) nous font rapidement raconter des bêtises.

Enfin tous les trois sur une photo !




            Les jours suivant sont dans la continuité de ces derniers. Nous nous rapprochons de Madrid chaque jour un peu plus et de cette étape que nos jambes redoutent, ce jour où nous devrons franchir la Sierra Guadarrama. Nos étapes reprennent un rythme soutenu, à plus de 80 kilomètres, dont une fois à plus de 100 par notre faute. Ce jour-là nous décidons de dormir à nouveau au bord d’un lac pour pouvoir se doucher et s’offrir une matinée de repos dans un cadre agréable. Après 80 kilomètres difficiles nous arrivons devant le panneau indiquant « Pie de la Presa » (Presa=Barrage). Fatigués et sûrs de notre Espagnol nous descendons ce chemin sinueux qui plonge dans des gorges vertigineuses dans un décor qui pourrait accueillir le tournage d’un Seigneur des anneaux 4. Arrivés tout en bas de cette longue descente nous arrivons au pied du barrage, mais du mauvais coté ! Et, cerise sur le gateau,  la nuit tombe et les gorges se révèlent être un lieu de nidification de…vautours !! Effectivement, quelques minutes plus tard un groupe de ces majestueux charognards tournoie au-dessus de nos têtes, attendant notre fin prochaine, avec des regards qui nous rappellent les nôtre observant l’eau des pâtes bouillir. C’est dans cette atmosphère morbide que nous devons remonter, épuisés, puis rajouter 12 km au compteur pour atteindre enfin le lac. Nous sommes récompensés par une vue magnifique, une table pour diner et une fontaine d’eau fraîche.

Embalse de Manzanares del Real

Le même mais en rose (oui oui on va mettre que des photos de coucher de soleil pendant 1 an... c'est notre spécialité)


Gravure de mode va !
            Après une bonne matinée à retrouver nos forces nous avalons assez vite les 80 km de notre étape suivante pour atterrir au pied du col de Navafria culminant à 1800 mètres d’altitude, de quoi alimenter nos cauchemars du soir. Nous dormons dans le village de Matamala, dans un parc à jeux abandonné, bien gardé par un troupeau de vaches. La nuit tombant, vient à passer un gigantesque troupeau de moutons qui manque de renverser nos tentes et notre riz qui cuit gentiment. Nous découvrons alors un berger, pour le coup vraiment pas bien cuit, grommelant des onomatopées et des bribes de phrases que seuls ses moutons semblent comprendre. Vincent tente une conversation avec notre ami mais le dialogue de sourds est vite abrégé.
Les vaches, les moutons, le berger, ce décor champêtre, pastoral, nous rappellent la montagne qui nous attend. Il est 10h, nous enfourchons nos vélos de 50 kilos et passons le panneau « col à 10 km ». Un cycliste suréquipé montant un bolide  de 3 kilos nous double à toute vitesse. Madrid nous appelle. Cette étape se fera avec les tripes. Les premiers lacets apparaissent dans les sapins, nous doublons une vache. Nous restons cramponnés, glissant péniblement à 9 km/h sur ce goudron pentu. Les panneaux kilométriques défilent lentement. 4, 5, 6.. 9, 10 ! Nous mettons nos dernières forces dans ce dernier kilomètre et voyons apparaître en haut ce fameux panneau que nous attendions tous :  « Comunidad de Madrid, Puerto de Navafria 1775 metros ». Quel soulagement ! Mais les réjouissances sont de courte durée. Il nous faut maintenant redescendre ces 10 km en 15 minutes puis remonter un col à 1550 mètres avant de voir apparaître, au loin, les immeubles de Nuevos Ministerios, un quartier moderne du nord de Madrid. Nous franchissons ce dernier col tout aussi péniblement et terminons cette journée qui en a semblé deux, au bord du lac de Manzanares el Real.

Notons tout de même que Côme a mis un cuissard de cycliste pour cette montée



         Après une journée de repos au bord du lac à dormir environ toute la journée, nous reprenons nos fières montures pour achever enfin ce prologue de notre Grande Echappée. Ce Paris Madrid qui sur un planisphère est à peine visible mais qui avait pour nous nous une grande importance. Les premières pages d’un livre, celles qui très vite te donnent une idée de la teneur du bouquin, si ça va te plaire ou si tu vas lire péniblement deux pages chaque soir. Et bien maintenant que nous avons fait ces derniers kilomètres, que nous sommes enfin installés dans cette ville qui nous est si chère, ce livre, nous sommes impatient d’en lire les prochaines pages.

Ci -dessus: le campement tel qu'on le rêve ...

Ci-dessus: la realité du campement (notons l'arbre à slip très réussi)


            C’est donc ici à Madrid, capitale de cette terre qui nous a accueillie pendant deux semaines de la plus belle des manières, que nous nous reposons enfin avant de reprendre l’avion pour la Tanzanie. Et c’est ici même que nous sommes accueillis chez Marion amie de l’ESCP, amoureuse de cette ville qui a décidé d’y prolonger son séjour pour y faire ses stages. L’eau boue, la table est mise, un bon diner nous attend et les faits viennent enfin rattraper l’écriture. Il est temps de faire la fête, les 5 prochains jours seront sans doute placés sous silence… J

Madrid

PS : restez connectés, bientôt nous mettrons en ligne un article sur les parties de pêche de Côme, les Echasses Landaises, le MP3 du cyclotouriste et évidement nos aventures tanzaniennes !


La sécurité sur les routes ...
... ça nous importe !







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